Le Québec a une tradition intellectuelle qui s'essouffle. On entend peu ceux qui développent une véritable pensée, qui prennent de la distance avant de s’exprimer. L’opinion n’est pas de la pensée. Pourtant, cette pandémie regorge d’exemples pour lesquels on aurait bien besoin de comprendre le pourquoi. Pourquoi tel groupe agit de telle ou telle façon ? Pourquoi certains partent en voyage ? Pourquoi certains ne veulent pas du vaccin ? Pourquoi certains ont fêté en groupe à Noël ? Au lieu de tenter de comprendre, on attaque, souvent avec violence. On leur colle des étiquettes d’idiots, de tatas, d’irresponsables, de nombrilistes et des pires. Ces attaques sont-elles révélatrices de qui nous sommes ? D’un Québec consensuel qui digère mal un comportement contraire à la majorité ? Pourquoi avons-nous de la difficulté à accepter que d’autres agissent différemment de nous ?
On pourrait se souhaiter, pour
2021, d’être moins sur la défensive et davantage à l’offensive avec des arguments
fondés, un peu plus réfléchis. Tenter de comprendre le pourquoi des
comportements aide grandement. Ceux qui n’agissent pas comme la majorité ne sont
pas tous des débiles. Les dérapages surviennent souvent sur les réseaux
sociaux, c’est vrai. Il faut se méfier de soi lorsque nous sommes derrière un
clavier. On perd notre jugement comme si le cerveau ne s’était pas encore
adapté aux contacts virtuels.
Nous aimerions peut-être que
l’humain soit constamment rationnel. Mais ce n’est pas le cas. L’économie
comportementale le démontre depuis longtemps. Une décision, ne pas se faire
vacciner ou voyager, par exemple, peut se prendre sans connaître les conséquences
réelles, par manque d’information, en empruntant des raccourcis, un phénomène
connu en psychologie. L’émotion et l’intuition peuvent jouer un rôle dans nos
décisions, décisions que nous regretterons peut-être plus tard. Il faut
également mentionner que nous avons tous une tolérance au risque qui diffère
d’un individu à l’autre. Ce niveau de tolérance pourra influencer notre
motivation à poser un geste ou non.
Les attaques que nous constatons
depuis plusieurs mois visent des minorités. Le cas des voyageurs dans le sud
est le plus révélateur. La conformité est pourtant une force puissante. Nous
avons une tendance naturelle à imiter les autres même si nous ne l’admettons
pas consciemment. Les autorités doivent
d’ailleurs s’en réjouir les mesures sanitaires étant largement suivies. Mais
l’amplification des médias et des réseaux sociaux est telle que nous avons
l’impression qu’un phénomène est généralisé alors que ce n’est pas le cas.
Remettons en perspective. Dans ce cas-ci, en réalité, peu de Québécois ont
quitté le pays pour le sud. Il est certain que notre entourage joue un rôle,
cette influence sociale pouvant nous conforter à poser des gestes, à prendre
une décision ou une autre. Si en plus nous avons tendance à aimer se
distinguer, à être différent, nous prendrons sans doute une décision qui va à
l’encontre de ce que fait la majorité.
C’est pour tout ce qui précède
que nous devrions faire davantage l’éloge du recul. Et le pratiquer.
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